La tonte différenciée ou tonte raisonnée est une gestion différenciée durable et évolutive de nos pelouses. Technique simple et efficace, il suffit de laisser faire la Nature et d'adopter une tonte plus durable et raisonnée. Certains écosystèmes sont abîmés et que l'on soit jardinier amateur ou confirmé, nous pouvons rapidement et sans frais restaurer la biodiversité qui déserte nos pelouses bien tondues.

Notre rôle de jardinier n'est-il pas de nous interroger sur nos manières de jardiner ? Je vous invite à découvrir une autre façon de voir la question de la tonte au jardin.

Au printemps, la tentation est grande de tondre court !

Pourquoi garder des zones non tondues au jardin ?

  • La prairie et les zones enherbées sont des lieux de vie de nombreuses espèces animales. En effet, on y retrouve notamment les auxiliaires du jardinier, une aide précieuse à lutter contre les ravageurs ;
  • Les inflorescences et les tiges des graminées captent l'humidité de l'air, qui redescend sous forme de gouttelettes jusqu'au sol. Cette eau pénètre au niveau des racines et ce même pendant des étés très chauds et secs. Cela permet un accès plus facile à l'eau pour vos arbustes, vos arbres et vos fruitiers. Bien sûr, c'est une réduction considérable des arrosages ;
  • Ramasser l'herbe coupée est une perte d'humus et de nourriture importante pour la vie du sol. Cette perte peut être compensée par l'apport d'engrais chimique, dommageable aussi bien pour la biodiversité que pour le porte-monnaie ;
  • La prairie permet à chaque type de plante qui la compose de développer leurs réseaux racinaires. L'eau de pluie s'infiltre mieux dans le sol. Tandis que les gazons exposent les sols à la battance de la pluie et à l'érosion. Découvrez également notre article sur les différents types de réseaux racinaires ;
  • Les tontes répétées sont très énergivores. Pensez au temps consacré à la tonte, à la consommation d'énergies fossiles qui forcément ont un coût ;
  • Une tonte drastique entraîne la disparition de fleurs sauvages ou ensauvagées. C'est une perte importante une source de nourriture pour de nombreux insectes. Les pollinisateurs et les ravageurs sont eux-mêmes une source de nourriture pour leurs prédateurs (oiseaux, chauve-souris, etc) ;
  • Dans une zone laissée libre, on trouve un cortège d'une grande diversité de plantes différentes. On y retrouve des plantes de familles, de genres et d'espèces différentes (rares pour certaines). Alors qu'une pelouse est une monoculture de graminées ;
  • La prairie stocke le CO2 lorsque le gazon, du fait des tontes régulières, le relâche ;
  • Les herbes hautes protègent le sol et ceux qui vivent, des rayons directs du soleil. Tandis que le gazon tondu court l'expose aux UV ;
  • Sans parler bien évidemment du bruit et de l'odeur (pollution auditive et olfactive) dégagés par les tondeuses thermiques.
Petite zone de prairie fleurie

Comment appliquer la tonte différenciée ?

La gestion différenciée consiste à adapter la hauteur et la fréquence des tontes dans les différentes zones du jardin. Quelle que soit la taille de votre jardin, il est possible de pratiquer une tonte raisonnée.

  • Dans un petit jardin

Vous pouvez laisser 2 ou 3 m2, une bordure, le pied des arbres et arbustes en végétation spontanée. Ou pourquoi ne pas laisser un jardinet sans tonte pendant une année ?

Rendez vite attrayant ces petits bouts de jardin que vous laisserez plus libres. Pour cela, plantez des bulbes à l'automne ! Ils fleuriront le printemps suivant : perce-neige, crocus, tulipes botaniques ou multiflores, scilles et tant d'autres. Semer des mélanges fleuris, un régal pour les abeilles et les papillons « prêt à l'emploi ». Tout un petit monde végétal qui se naturalisera pour nous donner chaque année encore et toujours plus de fleurs.

Enfin, pour la zone tondue (surtout pour les petites surfaces), pourquoi ne pas passer à la tondeuse hélicoïdale ? Souvenez-vous, dans un article, je vous dévoilais 5 bonnes raisons d'adopter une tondeuse manuelle.

  • Dans un grand jardin

La tonte des allées de cheminement marque visuellement les différents espaces. Elle lui donne un aspect esthétique et entretenu, tout en maintenant des zones plus chevelues, véritables réservoirs de biodiversité tant végétales qu'animales. Dans les zones tondues, laissez les «déchets» de tonte au sol afin qu'ils s'y décomposent et qu'ils fertilisent le sol. Pour des raisons purement esthétiques, vous souhaitez ne pas les voir sur votre belle pelouse, alors laissez-les sécher pendant 24h. Ensuite, utilisez-les pour mulcher le potager ou les massifs de fleurs. Faites des couches pas trop épaisses, ou bien mettez-les à composter en mélange avec des matières brunes et sèches. Enfin, essayez de relier entre elles les zones libres afin de maintenir des corridors écologiques.

De grandes allées sont tondues pour marquer le passage (photo : Gwenaëlle David)

Certaines zones peuvent également ne plus être tondues mais, simplement fauchées une ou deux fois par an. Ce sont des zones où l'on ne va que très peu, comme un verger que l'on fauchera :

  • une fois au printemps, au moment de la floraison des fruitiers. Ainsi, les pollinisateurs se concentrent sur les arbres et pas sur les fleurs sauvages ;
  • une deuxième fois au moment de la récolte des fruits afin de vous faciliter les accès et le travail.

D'autres espaces méritent d'être laissés en totale liberté. Dans ce cas, une fauche tous les deux, trois ans ou plus suffit. C'est idéal en bordures de haies et dans le fond du jardin.

À noter : En changeant chaque année les emplacements des zones de cheminement, vous créerez un nouveau design à moindre coup. Et vous obtiendrez ainsi un jardin en perpétuel mouvement.

Un exemple de gestion différenciée appliquée aux tontes dans les grands espaces (Photo : Gwenaëlle David)

Enfin, découvrez notre vidéo Une pelouse naturelle dans laquelle Olivier vous explique pourquoi laisser des espaces naturels.

Quid de la faune et des auxiliaires du jardinier ?

Ces herbes, ces fleurs, attirent tout un monde d'insectes comme des papillons. Ils viendront pondre sur les graminées dont leurs chenilles se nourriront jusqu'au moment de leur chrysalide.

Les coccinelles passent l'hiver à l'abri des herbes hautes. Au printemps, elles iront pondre sur les plantes attaquées par les pucerons comme vos rosiers ! Et quand on sait qu'une coccinelle peut pondre entre 50 et 400 œufs. Et qu'une seule larve peut dévorer à elle seule jusqu'à 9000 pucerons sur son cycle de trois semaines, on comprend d'un seul coup tout l'intérêt de la tonte différenciée, même pour un petit jardin.

Enfin, lorsque vous avez des zones à tondre, je vous conseille de toujours commencer par le centre de la zone. En effet, la faune qui y réside, effrayée par le bruit et par notre présence, puisse s'échapper par les côtés, ainsi la destruction de la microfaune sera moins importante.

Un carré laissé non tondu : vous pouvez appliquer cette règle à des espaces beaucoup plus réduits (Photo : Chantal Lalanne)