Sculptures végétales centenaires, alignements majestueux, marqueurs de l'histoire locale ou sujets millénaires, les arbres remarquables se détachent du patrimoine arboré "commun" par leur valeur exceptionnelle. Ils ont pour certains traversés les siècles et sont parvenus jusqu'à nous, prouvant l'incroyable longévité du règne végétal. Voici quelques-uns de ces arbres rares, à découvrir en région Occitanie. 

Toulouse : les platanes du canal de Brienne

Le canal de Brienne est un canal qui fait le lien entre la Garonne et le canal du Midi à Toulouse.  Il court sur 1 560 mètres, et tout le long de son parcours, il est accompagné par la voute verte et majestueuse du feuillage de 160 platanes. Depuis 2017, ces platanes sont classés "arborée remarquable", une distinction qui met en valeur leur histoire, leur taille et leur longévité. 

Le canal de Brienne fut planté d'ormeaux à sa mise en service en 1776, créant ainsi l'une des plus belles promenades de Toulouse. Mais les arbres sont périssables et les plantations initiales furent remplacées au milieu du XIXe siècle par les platanes actuels qui déployèrent leurs larges ramures le long du chemin de hallage, offrant au lieu et à la ville un bel espace de promenade et de respiration.

Cette labellisation engage la commune de Toulouse et les Voies Navigables de France à protéger ces arbres vénérables, mais ne les met malheureusement pas à l'abri contre une attaque toujours possible du chancre coloré, qui décime les platanes d'Occitanie.

Tourisme végétal : des arbres remarquables à voir en Occitanie
L'alignement de platanes du Canal de Brienne

Caunes-Minervois : les deux Platanes de la place de la République

Sur la place de la République, à Caunes-Minervois dans le département de l'Aude, trônent deux magnifiques platanes. Ce sont des Arbres de la liberté, plantés en 1792 au moment de la Révolution pour rappeler, à l'instar de véritables monuments commémoratifs, l'avènement des libertés nouvelles. Depuis tout ce temps, ils ont été les témoins des changements de ce beau village du Minervois environné de vignobles et de garrigues, connu pour son abbaye et la qualité de son marbre, utilisé dans de nombreux monuments comme le Château de Versailles. Plantés sur la jolie place du village, qui a conservé ses ruelles étroites et des maisons médiévales et Renaissance, ils ont été labellisés en 2017 et ombrent une fontaine de marbre local.

L'un de ces deux platanes offre un joli diamètre de 6,38 mètres. Sa hauteur n'est "que" de 14 mètres, car il a été taillé à de nombreuses reprises. Son état est assez satisfaisant pour un arbre urbain âgé de plus de 200 ans. En revanche, son comparse ne tient pas la même forme : son tronc a été rempli de béton pour l'aider à se maintenir debout. Malgré tout, son houppier reste bien dense et aucune charpentière ne semble souffrir. La base de son pied est plus évasée, et sa circonférence est de 7,03 mètres.

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Les deux platanes centenaires sur la petite place

Montolieu : les vieux Cyprès de la Chapelle Saint Roch

Montolieu est un village du nord-ouest de l'Aude, en région Occitanie. Il est connu pour être depuis 1990 un Village du livre, avec une quinzaine de librairies de livres anciens, neufs ou d’occasion et le Musée des Arts et Métiers du Livre. À l'est du village, la chapelle Saint Roch est bâtie sur une éminence rocheuse. Les archives du monastère ayant été détruites à la Révolution, son histoire reste mystérieuse, sa construction étant peut-être due au fait qu'en 1621 la peste ravagea la région, mais épargna le village.

Un groupe de trois Cyprès de Provence à port étalé (cupressus sempervirens var. horizontalis) plusieurs fois centenaires et classés arbres remarquables depuis 2014, complète magnifiquement le paysage méditerranéen autour de la chapelle. On estime qu'ils auraient environ 400 ans, voire 600 pour l’un d’entre eux compte tenu de ses dimensions : pris à 1,30 mètre de hauteur, son diamètre est de 4,56 mètres et sa hauteur de 14 mètres. De grosses branches charpentières divisent le tronc noueux de ces arbres vénérables et leur forme étalée les distingue des silhouettes fastigiées des Cyprès de Provence, rencontrées habituellement sur le pourtour méditerranéen. Ils ont été plantés par l’homme, certainement pour matérialiser le sommet et le lieu saint sur lequel ils veillent tels des gardiens immobiles, et sont peut-être contemporains de la construction de celui-ci, il y a 400 ans. Leur état sanitaire n’est pas excellent, quelques branches ont séché dans le houppier, mais on ne peut pas considérer que ces arbres soient véritablement en danger.

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Les silhouettes torturées des Cyprès centenaires de la Chapelle Saint Roch

Saint-Guilhem-le-Désert : le Roi-Platane de la place de la Liberté

Situé dans le nord du département de l'Hérault, Saint-Guilhem-le-Désert est un petit village médiéval situé au pied du plateau du Larzac, dans un décor de garrigue et de massifs minéraux entre les gorges de l’Hérault et le piémont languedocien. Étape spirituelle sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle, ce village historique, classé parmi les « Plus beaux villages de France » et fréquenté des touristes, s’est construit autour de son abbaye fondée en 804, elle-même inscrite au Patrimoine mondial de l’Unesco.

Au cœur de la cité médiévale, enraciné sur la place de la Liberté face à l'abbaye, un platane centenaire labellisé Arbre remarquable étale sa ramure majestueuse. Planté le 20 janvier 1855 pour célébrer la naissance de la Deuxième République, il possède un tronc de plus de 6 mètres de circonférence pour une hauteur d’environ 20 mètres. Très apprécié par les visiteurs et les habitants du lieu, il confère tout son charme à cette place qu'abrite des rayons du soleil. Cet arbre vieux de plus de 165 ans a été baptisé le « Roi platane » et grâce à ses racines immergées dans la rivière proche, gageons qu'il pourrait encore vivre plusieurs siècles. Une petite légende locale lui est associée : un âne attaché à son tronc se serait fait emporter par une crue du Verdus, le cours d'eau local, et aurait été retrouvé assis sur l'autel de l'église.

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Le platane impressionnant de la Place de la Liberté

Opoul-Périllos : le vieux Génévrier

Opoul-Périllos est un authentique village catalan, situé sur les contreforts des Corbières, dans le département des Pyrénées-Orientales. Au milieu de la garrigue et des vignes se trouve un arbre millénaire d’une beauté saisissante, protégeant de son ombre le vignoble qui l'entoure. Il s'agit d'un très vieux genévrier cade (Juniperus oxycedrus), petit arbre fréquent en région côtière méditerranéenne et caractéristique des garrigues et des maquis. 

Ce genévrier se détache du lieu avec majesté grâce à son port en parasol imposant, constitué d'une ramure très large et dense, et son tronc tourmenté, divisé en deux parties. Les propriétaires du domaine viticole sur lequel il est implanté annoncent sa circonférence impressionnante qui est de 4,60 mètres. Il aurait entre 1600 et 1800 ans : c'est donc un arbre unique, millénaire et encore bien vert auquel on peut encore souhaiter longue vie.

Le genévrier cade millénaire au milieu des vignes

Reynès : le vieux Chêne-liège du mas Santol

Reynès est une petite commune rurale située dans le sud-est du département des Pyrénées-Orientales, frontalière avec l'Espagne. C'est donc sur ce terroir entre mer et montagnes, situé sur les hauteurs du village, que se trouve le mas Santol dont les propriétaires produisent des cerises. Au sein de la propriété, un ancêtre vieux de plusieurs siècles a fière allure avec son tronc tortueux et son beau houppier ; c'est un chêne-liège (Quercus suber) dont l'âge est estimé à 300 ans. Remarquable pour sa taille, il arbore une hauteur de 20 mètres pour une circonférence de 5,60 mètres. Ces dimensions en font un des plus gros chêne-lièges d’Europe et il a reçu le prestigieux label de l’Association A.R.B.R.E.S. en 2003. Son tronc est dépourvu de son écorce, le liège, récolté à une époque difficile à déterminer.

Le chêne-liège centenaire de Reynès (photo Fabricio Cardenas — commons.wikimedia.org)

Port-la-Nouvelle : les Oliviers bonsaï

Port-la-Nouvelle est une commune du littoral audois intégrée au parc naturel régional de la Narbonnaise en Méditerranée, connue des touristes pour ses plages de sable fin, mais aussi pour ses sites Natura 2000 lagunaires. Deux arbres particuliers y ont été classés Arbres remarquables en 2012 : ce sont deux Oliviers espagnols taillés façon bonsaïs et plantés sur deux rond-points. Il est vrai que la labellisation reconnait d'ordinaire des arbres ayant poussé sur leur lieu de plantation d'origine avec une dimension patrimoniale et historique, et que ces plantations sur rond-point se démarquent des arbres remarquables habituels.

Et pourtant, il faut savoir que les vieux oliviers français ont quasiment tous disparu lors des hivers exceptionnellement froids de 1926 et 1956 qui ont décimé les oliveraies françaises. Dans les zones les plus protégées comme sur la Côte d'azur, il ne resterait que 16 oliviers millénaires et quasiment aucun centenaire. Et les Espagnols ont vu dans le marché des oliviers centenaires une occasion très rémunératrice de tirer parti de ces arbres vénérables, supportant bien les transplantations, à condition qu'elles soient faites dans les règles de l'art.

Ces deux oliviers vivaient donc paisiblement depuis 800 ans dans la province de Tarragone, au sud de Barcelone, mais le sort a voulu qu’ils se trouvent sur le tracé d’une nouvelle autoroute. Ils ont ainsi été arrachés et transportés en pépinière, puis replantés à Port-la-Nouvelle en 2009 pour y débuter une seconde vie. Les services de la municipalité ont voulu leur donner un côté esthétique affirmé de sculptures végétales par une taille en bonsaï. L'un d'eux est véritablement impressionnant, avec une forme de pont comportant plusieurs plateaux de végétation. Sa circonférence à la base est de 4,00 mètres et son âge a été estimé entre 700 et 800 ans. Son état sanitaire à la base semble plutôt médiocre, mais les oliviers ont des capacités de survie parfois impressionnantes.

L'autre olivier se trouve à une centaine de mètres sur un autre rond-point. Sa forme est plus classique, son houppier taillé en une succession de petits plateaux. Sa circonférence à la base est de 3,85 mètres et il mesure environ 3,5 mètres de haut. Son état sanitaire est assez satisfaisant et son âge a été estimé lui-aussi entre 700 et 800 ans.

Les oliviers pluri-centenaires transplantés à Port-la-Nouvelle depuis l'Espagne (photo Jacques Le Letty — commons.wikimedia.org)