Grâce à leur amour des fleurs et des jardins, nombreuses sont les femmes à avoir enrichi nos connaissances en botanique et en jardinage. De Joséphine de Beauharnais connue pour sa passion pour les roses à Jeanne Barret, qui ramena du monde entier près de 3000 espèces de plantes inconnues en France, partons pour un voyage dans le temps et une découverte de l'apport des femmes à l'univers des fleurs et des jardins.

Joséphine de Beauharnais, une impératrice passionnée par les roses

Impératrice des Français de par son mariage avec Napoléon 1er, Joséphine de Beauharnais (1763-1814) voue une véritable passion à la botanique. Après son divorce d'avec l'Empereur en 1809, elle consacre son temps à aménager et développer le parc du château de la Malmaison. Elle y fait construire une serre d'une longueur de 50 mètres et aux dimensions exceptionnelles pour l'époque. Chauffée par de grands poêles à charbon, c'est un écrin parfait pour Joséphine qui y cultive des plantes rares et exotiques. Grâce à ses relations avec le Muséum d'Histoire Naturelle, elle récupère des graines et des plantes venus de tous pays. Dans cette serre, 200 plantes nouvelles en France s'épanouissent pour la première fois, du magnolia pourpre à la pivoine arbustive et au camélia. Joséphine aime particulièrement les roses et cultive une collection de près de 250 espèces dans le parc et la serre. En 1805, elle nomme P. J. Redouté, peintre officiel des fleurs. A sa demande, il réalise une série de 120 planches reproduisant les fleurs de la Malmaison et un livre sur les Roses consultable en ligne. Aujourd'hui, on peut visiter le jardin de la Malmaison et découvrir l'univers floral cher au cœur de Joséphine.

Joséphine de Beauharnais (© Wikimedia Commons). A droite, planche botanique de P.J. Redouté : Pivoine officinale à fleurs simples (1833)

Jeanne Barret, une botaniste qui a fait le tour du monde

Gouvernante et compagne du botaniste Philibert Commerson, Jeanne Barret (1740-1807) apprend la reconnaissance de la flore et le classement des plantes auprès du naturaliste. Fréquentant les grands scientifiques de son époque, Commerson est envoyé en 1767 en voyage autour du monde au côté de Bougainville afin de répertorier et rapporter des spécimens de la flore des différents pays visités. Jeanne Barret brave les interdits et se déguise en homme pour pouvoir suivre Commerson dans cette expédition. Le navire met le cap sur l'Amérique et fait escale notamment au Brésil, à Tahiti, et à l'île Maurice. A la suite du décès de Commerson, Jeanne Barret fait ramener en France les herbiers et les 5000 plantes récoltées au cours de leur voyage, dont 3000 espèces sont encore inconnues en France. Ces collections rejoignent le fonds du Muséum d'Histoire Naturelle, contribuant ainsi à l'enrichissement des connaissances en botanique. Saluée par son courage par Louis XVI, elle est nommée « femme extraordinaire » par le roi pour avoir été la première femme à faire le tour du monde.

Jeanne Barret déguisée en marin pour l'expédition, et le Solanum baretiae nommé ainsi en son hommage (© University of Louiseville)

Agnès Arber, les débuts de la morphologie des fleurs

Célèbre botaniste britannique, Agnès Arber (1879-1960) est connue pour avoir développé les connaissances de la morphologie des plantes à fleurs, et ainsi que de l'histoire des herbiers imprimés. En 1912, elle publie un ouvrage de référence intitulé : Herbals, their origins and evolution. Elle livre ses découvertes par la publication d'articles et d'ouvrages particulièrement riches en dessins réalisés de sa main et illustrant les différentes parties des plantes. C'est la première femme botaniste à être élue membre de la Royal Society en 1946. Elle a également été récompensée par la médaille d'or de la Linnean Society of London en 1948 pour ses apports à la botanique.

Aconitum luteum et Nympheas dessinés par la botaniste Agnes Arber en 1912

Anna Atkins, la première photographe des fleurs

La botaniste britannique Anna Atkins (1799-1871) est une pionnière en matière de photographie des plantes. En 1839, elle devient membre de la Société Botanique de Londres. Elle se consacre à l'étude des algues marines anglaises, qui sont des plantes microscopiques. Confrontée à la difficulté de dessiner des plantes aussi minuscules, elle les illustre grâce au procédé du cyanotype inventé par John Herschel en 1842. La technique consiste à déposer les algues sur une feuille enduite d'une solution photosensible et à les exposer au soleil. Après un lavage à l'eau, l'image de l'algue apparaît en blanc sur un fond bleu. Entre 1843 et 1853, Anna Atkins publie ses découvertes et ses cyanotypes dans un ouvrage intitulé Photographs of British Algae. Il est considéré comme le premier livre de botanique illustré avec des photographies. Un exemplaire de cet ouvrage est conservé à la Bibliothèque du Muséum national d'Histoire Naturelle à Paris. On peut le consulter en ligne dans les collections numérisées.

Anna Atkins vers 1862 (© Nurstead Court Archives). A droite, Cystoseira granulata (cynaotype vers 1850)

Ellen Willmot, une jardinière d'exception

Jardinière britannique renommée, Ellen Willmott (1858-1934) se découvre une passion pour les fleurs et se consacre à l'aménagement des jardins de ses trois propriétés : Warley Place à Brentwood en Angleterre, Tresserve à Aix-les-Bains et la Villa Piacenza Boccanegra à Vintimille en Italie. A Warley Place, elle crée un jardin alpin, avec des rocailles et des cascades, et y cultive des plantes venues du monde entier, avec l'aide d'une centaine de jardiniers. En 1894, elle devient membre de la Royal Horticultural Society. En 1897, elle est la première femme, avec son amie Gertrud Jekill, à recevoir à Londres la médaille Victoria de l'honneur de la Royal Horticultural Society. Elle est reconnue pour son expertise des jonquilles, des iris et des roses. En 1910-1914, elle publie un ouvrage sur les roses intitulé The Genius Rosa, illustré par des aquarelles d'Alfred Parsons. Plusieurs fleurs portent son nom, comme la Rose Ellen Willmott.

Gertrud Jekyll, l'art des jardins à l'anglaise

Gertrud Jekyll (1843-1932) est une paysagiste britannique célèbre, amie d'Ellen Willmott. Elle s'intéresse à la photographie et à la peinture, avant de se consacrer aux jardins, à la suite de problèmes de vision. Adepte d'un jardin au style naturel voire sauvage, typique des cottages anglais, elle est connue pour ses créations paysagères menées avec l'architecte Edwin Lutyens (1869-1944). Avec lui, elle invente une nouvelle forme d'architecture de jardins, fondée sur l'harmonie des couleurs, des textures et des formes florales. Egalement journaliste, elle nous laisse des ouvrages inspirants sur l'art des jardins, comme Couleurs et jardins, Naissance d'un jardin et Propos sur les jardins. Elle a créé plus de 400 jardins, essentiellement au Royaume Uni, à l'exception du parc du Bois des Moutiers qui se trouve en France, à Varengeville-sur-Mer en Normandie. Elle a donné son nom à une rose anglaise créée par David Austin.

Gertrude Jekyll, et ses jardins de Munstead Wood (© Ester Westerveld)

Pour aller plus loin

De nombreuses autres femmes inspirantes se sont illustrées dans l'univers des jardins, comme la première botaniste américaine Jane Colden, la Princesse Greta Sturdza avec son jardin Le Vasterival à Sainte-Marguerite-sur-Mer en Normandie, ou Beth Chatto avec ses jardins près de Colchester en Angleterre.

Jardins de Beth Chatto