Ces derniers jours, il pleut sur une grande partie de la France. Il pleut tellement que nous sommes en vigilance rouge sur plusieurs départements. Nous n'irons pas à la piscine, la piscine viendra à nous.

Confrontés à ces inondations, certains maudissent le ciel. Moi, je maudis surtout la terre : suppression des haies et des talus, mauvaises pratiques agricoles, imperméabilisation des sols… Voici le trio gagnant pour créer érosion, coulées de boues et surtout, inondations.

Si nous ne pouvons malheureusement pas faire grand-chose contre ces phénomènes climatiques violents, nous pouvons tous, à l'échelle de notre jardin, contribuer à une meilleure gestion des eaux pluviales. Voici quelques exemples d'actions.

1) Récupérer l'eau de pluie

La récupération de l'eau de pluie est généralement présentée comme un bon moyen pour arroser gratuitement. C'est plus malin que d'avoir recours à l'eau du réseau. Néanmoins, cette pratique est également bonne contre les inondations. En effet, l'eau récupérée est stockée temporairement et ne part pas dans le réseau qui, en cas de fortes pluies, est déjà saturé. Pour que cette solution soit efficace (des réservoirs continuellement pleins ne servent à rien), cette eau devra ensuite être progressivement évacuée dans le jardin. Savez-vous, d'ailleurs, que ce procédé est employé dans certaines villes où des réservoirs sont intégrés dans les chaussées ?

Pour récupérer l'eau de pluie, l'utilisation de cuves aériennes est la solution la plus fréquente. Ces cuves de 1000 litres ne sont pas très esthétiques, mais vous pouvez facilement les habiller à l'aide de plantes grimpantes, par exemple.

Récupération d'eau : les cuves de 1000 litres sont pratiques mais parfois peu esthétiques - Photo Flickr

La cuve enterrée est forcément plus discrète. Elle est aussi plus coûteuse, mais elle offre l'avantage de contenir beaucoup plus (3000, 5000 litres...). Pour calculer le volume nécessaire, il faut d'abord calculer le volume d'eau de pluie récupérable. Pour ce faire, on fait généralement ce calcul :

volume moyen des précipitations annuelles, en litre par m2
(1 mm de pluie équivaut à 1 litre au m2)
x la surface du toit
un coefficient d'évaporation
de 0,8 pour un toit en pente et de 0,6 pour un toit plat

Exemple pour Bordeaux avec un toit plat de 80 m2 => précipitations annuelles moyennes 931 mm = (931  x 80) x 0,6 = 44688 / 1000 = 44 m3 par an

2) Renoncer au bitume au profit d'un sol drainant

Le bitume est, fort heureusement, très peu présent dans les jardins… mais on le retrouve très fréquemment dans les cours, les espaces de stationnement. C'est "propre" et sans entretien. C'est aussi très imperméable : la terre est privée d'une surface infiltration et l'eau ruisselle.

Plusieurs alternatives, laissant pénétrer l'eau, existent pour les particuliers : le gravier posé sur un support alvéolé adapté comme l'Alvésostar®, un revêtement draînant, comme le Stardraine®, deux revêtements respectueux de l'environnement, distribués par l'entreprise Daniel Moquet, mais aussi les pavés joints gazon. Ces pavés, carrossables, sont soit creux, soit pleins et posés alors avec des écarteurs. Les interstices sont ensuite garnis de gazon ou de tout autre couvre-sol piétinable de votre choix.

Si vous recherchez une solution encore plus économique, pourquoi ne pas vous orienter vers un mélange terre - pierre (40 % de terre végétale + 60 % de gravier calibre 20 - 40) ? Une fois engazonné, ce type de revêtement, drainant, est agréable à l'œil et ne demande que peu d'entretien.

3) Végétaliser les toitures

Les toitures végétales sont esthétiques, elles sont également écologiques : dans l'habitat, ce sont de très bons isolants thermiques et phoniques. Dans les grandes villes, elles jouent également un rôle de climatiseur. Leur intérêt réside aussi dans leur capacité à retenir temporairement l'eau et de pouvoir compenser, du moins en partie, l'artificialisation induite par l'occupation d'un bâtiment. Pour la maison, nous vous conseillons de faire appel à un professionnel, mais, au jardin, c'est une technique facile à mettre en œuvre sur un abri, un poulailler, la maisonnette des enfants, etc. Une bâche PVC ou un morceau d'EPDM, un feutre géotextile, du terreau ou de la terre mélangée à de la pouzzolane et le tour est joué ! Il ne vous reste ensuite plus qu'à y installer des sedums ou toute autre plante adaptée à votre climat.

Toiture végétale - Source : Wikipédia

4) Planter et replanter des haies, de préférence sur un talus

C'est prouvé, l'arasement des talus et la disparition des haies ont amplifié les dégâts liés aux fortes précipitations.

En effet, les talus, lorsqu'ils sont orientés de façon perpendiculaire à une pente, permettent de protéger du ruissellement et donc, de protéger les sols de l'érosion. Les haies, elles, forment des barrières physiques qui freinent l'eau, elles fixent également les sols et agissent comme de véritables "pompes" qui favorisent l'infiltration de l'eau. Pour éviter les inondations, mais aussi pour la biodiversité, nous ne le dirons jamais assez, plantez des haies !

L'utilité des haies bocagères - Source : Breizh bocage Fougères

5) Recueillir et apprivoiser l'eau : mares, noues et jardins d'infiltration

Si l'eau fait peur, c'est pour sa force et son caractère incontrôlable. La canaliser et la contenir fait partie des mesures qui permettent de l'apprivoiser. À grande échelle, ce sont les fossés de bord de route, les noues (de larges fossés, assez peu profonds, engazonnés ou plantés) dans les écoquartiers et les bassins de rétentions qui jouent ce rôle. On ne s'en aperçoit pas forcément, mais ils réduisent les conséquences des pluies diluviennes.

À l'échelle du jardin, pourquoi ne pas creuser une mare qui pourra accueillir une partie des pluies. Cela vous semble être un chantier trop important ? Orientez-vous alors vers un petit jardin de pluie ou "jardin pluvial" : de la taille d'un grand massif, ces jardins tiennent le même rôle que les noues. Ils permettent de recueillir et d'absorber les eaux pluviales du toit. Contrairement à une mare, l'eau n'est pas destinée à stagner, mais à s'évaporer. La pose d'une bâche est remplacée par une épaisse couche d'un matériau poreux, drainant comme le sable ou la pouzzolane. Ces jardins d'infiltration sont plantés avec des végétaux qui résistent aussi bien à l'immersion qu'à l'absence momentanée d'eau comme les eupatoires, les salicaires, les filipendules

Mare naturelle

Si vous avez les pieds dans l'eau et que, de surcroît, vous vivez entouré(e) d'immenses parkings goudronnés ou de vastes champs monocultivés, ces mesures vous paraîtront certainement anecdotiques… Alors, souvenez-vous de la légende du colibri racontée par Pierre Rabhi :

"Un jour, il y eut un immense incendie de forêt. Tous les animaux, terrifiés, atterrés, observaient impuissants le désastre. Seul le petit colibri s’activait, allant chercher quelques gouttes avec son bec pour les jeter sur le feu. Après un moment, le tatou, agacé par cette agitation dérisoire, lui dit : "Colibri ! Tu n’es pas fou ? Ce n’est pas avec ces gouttes d’eau que tu vas éteindre le feu ! "

Et le colibri lui répondit : "Je le sais, mais je fais ma part."

Pour aller plus loin :

à lire, sur le sujet : Les jardins et la pluie, Gestion durable de l'eau de pluie dans les jardins et les espaces verts - Nigel Dunnett, Andy Clayden - Editions du Rouergue